On m’a demandé récemment -et à plusieurs reprises - si je n’avais pas peur de “m’enfermer dans tout ce féminisme”…
Toutes ces lectures féministes, tous ces podcasts féministes,
ces rencontres féministes,
ces groupes whatsApp/Discord féministes,
ces après-midi n°d’urgence et ces conversations lors de chaque dîner qui font de moi la “Féministe de service”.
Je suis touchée que l’on s’inquiète pour moi.
Peinée que l’on s’inquiète pour ça.
Je suis féministe depuis que des garçons établissaient un classement des plus jolies filles sur des listes qui circulaient en classe au collège.
Féministe sans le savoir.
Je demande aussi pourquoi Esmeralda part avec le chevalier alors que le bossu, lui, l’aimait VRAIMENT. Écoeurée par l’injustice avant tout.
Je ne me suis jamais sentie trop à ma place, j’ai toujours été en colère, je me suis toujours méfiée sans savoir de quoi. J’ai vraiment cherché à ce qu’on m’aime, à correspondre à ce qu’on attendait de moi. Chaque fois je me suis pris les pieds dans le tapis. Une chose est sûre, j’aurais volontiers été quelqu’un d’autre plutôt que moi. Un garçon de préférence.
Et puis progressivement le féminisme est entré dans ma vie. Un podcast ici, un article là, un instagram qui n’est plus fait que de ça. J’ai compris que je ne voulais pas être un garçon, je voulais avoir accès au monde.
Le féminisme est une prise de conscience. Il peut être violent, libérateur, enthousiasmant, il peut rendre tolérant comme être vindicatif, rassurant ou en colère. Chaque féministe a son propre féminisme : en fonction de ce qu’iel est, de ce qu’iel a vécu, de celleux qu’iel a rencontré.e.s, de son éducation, de son niveau de déconstruction. Nos idées évoluent, nos principes, nos convictions avancent avec le monde.
Mon féminisme est une réponse rassurante à toutes les questions que je me posais, et à celles que je ne posais pas encore.
C’est une ouverture sur un autre monde, c’est un enrichissement.
Quand des féministes parlent d’économie, ça m’intéresse.
Pas parce que ce sont des féministes.
Parce qu’iels abordent le sujet sous une autre perspective, en élargissant l’angle jusqu’à m’y inclure.
En expliquant ce qui me manquait pour comprendre, en mettant le doigt sur ce qui me dérange. Tout simplement parce que ça ne m’incluait pas et donc ne me concernait pas.
Mon féminisme parle d’écologie, de politique, de médecine, de traditions, d’éducation, d’art, de littérature, de musique, de religion, de cinéma, de moeurs, de sport, de journalisme, de colère, de tendresse, de bienveillance, de confiance, de compréhension, d’empathie, de tolérance, d’amour…
Non, mon féminisme ne m’enferme pas.
Au contraire. Il m’ouvre au monde.
Enfant je récitais les planètes avant de m’endormir, il y a toujours eu un Science & Vie qui traînait à la maison et j’étais curieuse de savoir s’il y avait une autre forme de vie, ailleurs. J’ai été élevée aux Star Wars (et au baiser forcé de la princesse Leïa que je trouvais chargé d’un érotisme mystérieux à l’époque), en quête de conquête de la galaxie.
Mon féminisme me révèle à moi-même.
Je viens de cette galaxie mystérieuse : je suis une Femme, pas un alien. Comme chaque personne en situation de handicap, homo, racisée, trans : autant de vies parallèles qu’on ignore trop souvent, qu’on ne voit pas, qu’on n’entend pas, qu’on fantasme surtout, à qui on prête parfois de mauvaises intentions.
Quand on donne la parole à l’autre côté de la force, c’est l’entièreté de l’univers qui s’offre à nous. C’est un dialogue plus qu’un discours.
Une conversation.
Comme chez les hommes, les oiseaux ou les fourmis : toustes les féministes ne sont pas d’accord sur tout, chacun.e évolue au prisme de ce qu’iel est.
Comme dans toutes les communautés, toutes les familles.
Toutefois je crois que nous sommes toustes d’accord pour dire que cet univers parallèle a sa place dans ce monde et que cet univers parallèle est passionnant, enrichissant et mériterait d’être partagé avec le plus grand nombre.
Si nous créons des safe space, si nous dressons parfois les remparts de l’entre-soi, si nous retournons à bord de notre vaisseau c’est que le monde nous épuise et nous désespère. Comme des chatons nous nous glissons derrière le canapé pour panser nos blessures, à l’abri, pour nous retrouver, nous recharger d’espoir et d’envie, nous nourrir mutuellement, nous aimer, nous rassurer. Mais nous reviendrons.
Parce que ce monde est aussi le nôtre, et parce que le féminisme est généreux.
Mon féminisme ne blâme personne.
Mon féminisme souhaite améliorer les choses.
Mon féminisme n’est ni une religion, ni une politique. C’est un état d’esprit. C’est une idéologie : celle de l’égalité, du partage et du respect.
J’ai croisé des hommes odieux, imbus de leur personne, in-intéressants, racistes, homophobes, fermés, chiants. J’ai croisé des femmes qui étaient aussi ainsi. Mercredi 11 novembre, la seule personne ayant refusé de coller les numéros d’urgence en cas de violences faites aux femmes ou aux enfants dans sa boutique était… une femme… libraire.
J’ai croisé des chiens qui mordaient, d’autres qui protégeaient.
J’ai croisé des gens méchants, parce qu’ils étaient désespérés, parce qu’ils avaient peur, ou qu’ils étaient simplement “mal éduqués”.
Je ne parle pas de manger la bouche ouverte, de dire “bonjour” le matin, ni même “merci”. Je parle de celleux qui ont été conditionné.e.s depuis toujours par un monde obsolète, qui leur a inculqué de mauvais réflexes, de fausses croyances qui nous tiennent éloigné.e.s les un.e.s des autres, méfiant.e.s.
Iels sont nombreux.
J’en faisais partie.
J’en ferai toujours partie mais j’essaie chaque jour de m’améliorer un peu.
C’est ça mon féminisme : considérer qu’on a toustes notre place, qu’il n’y a aucune raison valable pour que certain.e.s ne se sentent jamais intégré.e.s, ne se comprennent pas, ne se reconnaissent pas, se détestent.
Garder en tête qu’on se méprend souvent.
Qu’on blesse, qu’on exclut, qu’on gêne, qu’on silencie sans forcément vouloir faire du mal. Parce qu’on pense mal, qu’on se pense mal. Qu’on se panse mal.
Mon féminisme n’est pas seulement à la gloire des Femmes.
Mon féminisme est à la gloire d’une humanité partagée ; à la recherche d’une réelle égalité des chances, et de la place pour l’épanouissement des potentiels, du respect de l’autre quoi qu’il nous en coûte.
Parce que c’est ça la richesse éternelle : celleux que l’on croise, qu’on lit, que l’on écoute, que l’on découvre, avec qui l’on débat, que l’on cherche à comprendre.
Je ne suis pas contre qui que ce soit.
Je ne fais pas la chasse aux chasseurs.
Il y a de la place en chacun de nous pour nous améliorer individuellement, progresser et faire progresser notre société, nous en avons tous quelque chose à en tirer.
Mon projet est d’accompagner chaque femme, chaque homme, chaque salarié.e qu’il me sera donné de rencontrer dans la compréhension de son propre comportement, dans la rationalisation de ses actions pour décupler son potentiel à grandir et à faire grandir celleux qui l’entourent.